Lydia Ourahmane : Barzakh

Exhibition review

Revue 02

Triangle - Astérides, Marseille, France

Fall 2021

Sur le boulevard Moustapha Benboulaid à Alger, un appartement vidé de son contenu – corps comme objets – arbore désormais une nouvelle porte. L’originelle se trouve aujourd'hui dans l'exposition personnelle Barzakh de Lydia Ourahmane (née en 1992 à Saïda, Algérie) présentée à Triangle - Astérides à Marseille, après une première présentation à la Kunsthalle de Bâle. Arrachée à son architecture et, par conséquent, reniée de sa fonction protectrice initiale, cette porte incarne non seulement la mise à nu de l'artiste derrière ce geste (puisque ses effets personnels et ceux de la précédente occupante décédée de l’appartement sont exposés) mais aussi des valeurs culturelles et administratives contraignantes. Symbolisant le poids des histoires héritées que l’artiste affronte à travers sa pratique, une installation réunit ces deux portes ; celle, originale, provenant de l'immeuble haussmannien datant de 1901 auquel elle appartenait, et une seconde, en métal, ajoutée pendant la paranoïa de la décennie noire en Algérie (qu’Ourahmane et sa famille ont fui pour vivre entre le Royaume-Uni et l’Espagne). Le tout s’apparente à un seuil non fonctionnel.

Bien qu'il s'agisse indéniablement d'un paysage domestique, la domesticité n'est pas en cause ici. Il s'agit plutôt d’un prisme à travers lequel l'artiste révèle des traumatismes personnels, socio-politiques et post-coloniaux, ainsi que les systèmes qui les perpétuent. La force motrice de l'exposition partait du désir de l'artiste de comprendre le concept du foyer, alors qu'elle se trouvait bloquée en Europe, ne pouvant pas rentrer en Algérie durant la pandémie. S'en est néanmoins suivie une expérience émotionnelle enchevêtrée à des problématiques logistiques, qui a rendu secondaire la manifestation physique du « home ». En ce sens, le foyer présent peut être considéré comme l'oikos, un terme grec qui désigne simultanément la disposition physique d'une maison, son économie et les êtres qui l'occupent. Il s'agit donc d'un paysage complexe dans lequel s'entremêlent émotion et juridiction. L'enquête de Lydia Ourahmane à propos de ces systèmes se cristallise dans la manière qu'ils ont de s’exprimer au sein de réalités « corporelles » – qu'il s'agisse d'un appartement, d’un organe de pouvoir ou du corps physique, souvent celui de l'artiste elle-même.

Pour la réalisation de Barzakh, chacun de ces corps a dû entrer dans un échange de négociation, de patience et de persévérance. Un simple plan de l'appartement dessiné par l'artiste dans l'un de ses carnets en 2019 – alors qu’elle commençait déjà à réfléchir à ce que cet espace pouvait représenter – a peut-être été le catalyseur de l'idée d'envoyer tout le contenu de l'appartement, entraînant la mobilisation des personnes et des objets. Ourahmane étant elle-même en France à l'époque, elle a pu compter sur l’aide de Myriam Amroun et Khaled Bouzidi de ‘rhizome’ (organisation d'art indépendante à Alger) pour faire face au ministère de la Culture d’Algérie. Ces derniers ont réussi à créer une nouvelle acception de ce que pourrait être un objet d'art (dans ce cas, une installation, au sens du « ready-made »), s’assurant que cet « objet » puisse désormais quitter temporairement Alger pour une exposition, et, finalement, emballant, extrayant et expédiant le tout – des bibelots et produits de beauté usagés aux appareils électroménagers, en passant par les meubles et la porte – à Marseille, puis à Bâle, puis de nouveau à Marseille, avant son retour obligatoire à Alger. Ainsi, le désir initial de comprendre le « chez soi » s'est transformé en une catégorisation et une stérilisation de l’intime, s’exprimant par la circulation des objets à travers les frontières lorsque les corps ne sont pas en mesure de le faire. Il ne s'agit pas d'une reconstruction qui laisse place à l'artifice et formalise la nostalgie, mais plutôt d'un désapprentissage des notions sociétales du foyer par le biais du défaire, du « dé-nommer ». L'artiste dit en effet ne jamais s’être sentie autant chez elle que lors des appels FaceTime avec ses proches passés tout au long du processus, détachant ainsi cette notion du foyer d'un espace physique. Aujourd'hui, elle ne peut même pas se résoudre à emprunter ses propres livres de l'exposition, ce qui lui donne l'impression d'être une voleuse dans sa propre maison, car le démantèlement et l'ouverture simultanés de l'espace ont déplacé le statut du personnel.

Déplacement, extraction, expulsion : ces gestes destinés à effacer sont réappropriés par l'artiste dans un acte similaire à ce que la philosophe Elsa Dorlin théorise sous le nom de « care négatif ». Selon Dorlin, le care négatif est l'effort permanent exercé afin de comprendre au mieux l’autre dans le but de se défendre – un effort constant des dominé·es pour réagir face au dominant·e plutôt que de reculer . La démarche d'Ourahmane est similaire dans la mesure où sa persévérance permet une inversion de la négativité en une forme de care qui facilite le changement et le lâcher-prise. The Third Choir (2014) illustre cette ténacité et cette détermination à travers un autre déplacement d'objets. Réalisée pour l'exposition de diplôme de l'artiste à Goldsmiths à Londres, puis exposée à Palerme pendant Manifesta 12 (2018), cette œuvre est une installation sonore composée de vingt barils de pétrole Natfal exportés d'Algérie, contenant chacun des téléphones portables transformés en émetteurs radio. Les 934 documents illustrant les correspondances de l’artiste avec le gouvernement pour exporter ces barils, une peinture commandée par BP permettant de financer le projet, et les interminables négociations derrière cet exploit apparemment impossible, ont fait de The Third Choir la première œuvre d'art à être exportée légalement d'Algérie depuis sa libération de la France en 1962, réécrivant ainsi la législation sur l'exportation qui avait été mise en place pour protéger la culture. Se plaçant dans une position compromettante tout au long du processus – en particulier en tant que jeune femme célibataire issue d'une famille chrétienne qui tente face aux autorités algériennes d'exporter des objets litigieux– Lydia Ourahmane tire néanmoins un bilan positif de cette opération désavantageuse : « Il est surprenant de considérer l'empathie ou l'humanité comme des conditions miraculeuses dans le monde hermétique de la bureaucratie et de l’administration. [...] Rencontrer quelqu'un en position de pouvoir qui veut réellement aider signifie qu'il peut encore y avoir de l'espoir. Que nous ne sommes pas entièrement handicapé·es, motorisé·es et fonctionnant au détriment les un·es des autres. Et nous devons continuer à nous battre pour ce genre d'espace . »

Déplacement, extraction, expulsion : des gestes qui conduisent à l'absence, une absence qui traverse la pratique de l'artiste. Dans l'œuvre Oskar and Ola (2019) présentée à Triangle - Astérides dans le cadre de l'exposition collective En attendant Omar Gatlato : Regard sur l'art en Algérie et dans sa diaspora curatée par Natasha Marie Llorens au printemps 2021, deux chaînes métalliques attachées à des colliers de chiens sont posées au sol. À côté des objets, une vidéo (Boudjima , 2021) des chiens qui ornaient autrefois ces colliers les montre courant librement dans un champ en Algérie. Ces chiens témoignent du fait que les forces militaires ont scellé la porte de la maison familiale de l'artiste, qui servait autrefois de lieu de culte aux chrétiens d'Algérie, la liberté de religion ayant été légalisée en 2006, puis interdite en 2017. L'absence de corps représentée par les colliers rappelle l'inaccessibilité de la maison et reflète la négociation de l'artiste avec le violent processus de se sentir poussé·e hors d'un espace physique. Cette absence, ou plutôt cette suspension, est en effet présente à nouveau dans Barzakh, comme l'indique le titre lui-même : en arabe, il fait référence à un état liminal, intermédiaire, qui peut faire référence à un espace où un esprit attend entre la vie et la mort, à un espace physique, ainsi qu'à un lieu de jugement.

La pratique d'Ourahmane est une forme de travail à la fois émotionnel, spirituel et physique qui est nécessairement relationnel. Et dans les pratiques relationnelles, le corps est à l'œuvre, même si, parfois, il est absent. « Mon travail est une source vitale. Et donc, mon corps devient le site . » In the Absence of our Mothers (2018) est l’apogée du corps comme site dans son travail. Une chaîne en or fondue, achetée par Ourahmane à un étranger au même prix qu'un voyage en bateau pour fuir vers l’Europe, rencontre l'histoire du grand-père de l'artiste qui s’est arraché ses propres dents pour être libéré de l'armée : deux récits de fuite distincts, qui prennent forme dans une même dent en or implantée dans la bouche de l'artiste. Non pas un geste masochiste pour s'infliger de la douleur, mais plutôt une façon de comprendre le traumatisme et de l’affronter. « Je souffrirais si je ne faisais pas le travail que je fais » affirme l'artiste. Droit du sang (2018) poursuit dans la même veine, puisqu'il s'agit d'une œuvre documentant le processus de demande de la nationalité française, révélant l'absurdité qui s’exprime dans le pouvoir que les procédures bureaucratiques ont sur les identités individuelles. Dans ces œuvres, des formes de care négatif et d'affect matériel donnent une réalité corporelle aux histoires d'émigration et de résistance.

C'est à partir du corps que se pose la question de la surveillance, et de la manière dont nous sommes rendus conscient·es de nos mouvements dans un espace, volontairement ou non. Car la surveillance est un thème commun à la pratique de l'artiste, qui prend deux formes distinctes dans Barzakh. D'une part, les sculptures en verre soufflé posées sur les différents meubles voilent, mais ne cachent pas, des mouchards auxquels est attribué un numéro de téléphone, permettant à quiconque d'accéder à l'exposition même à distance et d'écouter ce qui s'y passe à tout moment. De l'autre, un laser (Eye, 2021) scinde l'espace d'exposition, projetant dans l'espace des informations recueillies à l'extérieur (par un système de miroirs). Dès que le laser est obstrué par le corps du·de la spectateur·trice, la transmission du son en direct s'arrête, ou évolue. Chacun de ces objets rend le·la spectateur·trice très conscient·e de son comportement dans l'espace, influençant peut-être la façon dont il·elle s’y comporte. Ces dispositifs de surveillance rappellent que les espaces domestiques ne sont pas tous des foyers, des espaces de sécurité et de confort, mais plutôt, pour certain·es, des sites de violence, de peur et de paranoïa.

En parlant de Live Call (2019) – une autre œuvre de surveillance et de mise à nu pour laquelle l'artiste a mis son propre téléphone portable sur écoute, permettant à celles et ceux qui font l'expérience de l'œuvre d'écouter ses moindres mouvements et conversations pendant toute la durée de l'exposition – Ourahmane explique qu'elle « expérimente une sorte de chaos qui semble plus proche de la vérité ». Cette déclaration n'est pas sans rappeler un texte trouvé dans le livre de Sophie Al Maria, Sad Sack : Collected Writings, qui repose silencieusement sur le bureau de l’artiste dans Barzakh, en attendant son retour à Alger. « Avalée par le chaos qu'elle portait autrefois comme une couronne […] elle continuera [pourtant] à danser jusqu'à ce que vous la voyiez. Jusqu'à ce que vous croyiez en elle. Jusqu'à ce que vous l'écoutiez. Jusqu'à ce que vous écoutiez – ce qu'elle veut vraiment dire ». Face aux enfers administratifs et aux traumatismes, Lydia Ourahmane rend inlassablement possible ce qui semble impossible, surmontant le chaos pour arriver à une forme de soin. Une œuvre qui s'appuie certes sur des expériences profondément personnelles, mais qui pointe du doigt les réalités sombres dont nous héritons collectivement et propose une manière singulière de les traiter.

1.Elsa Dorlin, Se défendre, Éditions La Découverte, Paris, 2019, p. 200-212.
2. Ibid.
3. Lydia Ourahmane, “On Belief: A conversation between Lydia Ourahmane and Eliel Jones,” X-tra, 2021.
4. Lydia Ourahmane « Home is Where You Are: Conversation Between Lydia Ourahmane and Elena Filipovic » publié dans le cadre de l’exposition Barzakh à la Kuntsthalle de Bâle, 02 mars – 16 mai 2021.
5. Discussion avec l’artiste le 13 septembre 2021.
6. Lydia Ourahmane en discussion avec Harry Woodlock dans le cadre du « Vital Exhaustion: Late Capitalism and the Crisis of Pain », 4 décembre 2020.
7. Sophia Al Maria, Sad Sack. Collected Writing, Book Works, London, 2019. Traduit de l’anglais: « Swallowed by the chaos she once wore like a crown […] And she’ll keep dancing till you see her. Till you believe in her. Till you listen. Till you listen – to what she really means. »

ENGLISH

On the Boulevard Moustapha Benboulaid in Algiers, an apartment emptied of its contents– both bodies and objects– bears a new door. The original stands today in Lydia Ourahmane’s (born 1992 in Saïda, Algeria) solo exhibition Barzakh presented at Triangle – Astérides in Marseille, after its first presentation at the Kunsthalle Basel. Ripped from its architecture and, in turn, renounced of its original protective function, this door is the embodiment not only of the exposure of the artist behind this gesture– as her personal belongings and those of the previous deceased occupant amongst which Ourahmane carefully inhabited the space are on display– but also of constraining cultural and administrative values. Symbolizing the weight of inherited histories that the artist confronts through her practice, an installation brings together these two doors; the original one from the 1901 Haussmannian building to which it belonged, and a second one, made of metal, added during the paranoia of the black decade in Algeria (which Ourahmane and her family fled to live between the UK and Spain). The ensemble stands as a non-functional threshold.

Although undeniably a domestic landscape, domesticity is not in question here. It is rather a lens through which the artist reveals personal, socio-political and postcolonial traumas, and the systems that perpetuate them. The propelling force behind the exhibition was the artist’s longing to understand the concept of “home” as she found herself in Europe not able to return to Algeria during the pandemic. Yet, what nevertheless followed was an emotional experience entangled with administration that rendered the physical manifestation of the “home” secondary. In this sense, the “home” present can be considered as the oikos, an ancient Greek term that simultaneously refers to the physical layout of a home, its economy, and the beings that occupies it. Thus, a complex landscape in which emotion and jurisdiction intertwine. Lydia Ourahmane’s investigation into such systems crystallizes in how they are expressed in corporeal realities– whether that be an apartment, a governing body, or the physical body, often that of the artist herself.

For Barzakh to be conceived, each of these bodies had to enter into an exchange of negotiation, patience and perseverance. A simple blueprint of the apartment drawn by the artist in one of her notebooks in 2019– the artist already in negotiation with what that space represented– was perhaps the catalyst behind the idea to send all of the contents of the apartment resulting in the mobilisation of both people and objects. Ourahmane herself in France at the time, she relied on the Myriam Amroun and Khaled Bouzidi of rhizome (an independent art gallery and organization, Algiers) to face the Ministry of Culture of Algeria. They eventually succeeded in creating a new category of what an art-object could be (in this case, an installation, in the sense of the “ready-made”), assuring that this “object” could now temporarily leave Algiers for exhibition purposes, and finally wrapping, packing, extracting and shipping everything– from trinkets and used beauty products, to appliances, furniture, and the door– to Marseille, then Basel, then back to Marseille, before its obligatory return to Algiers. Thus, the initial desire for understanding “home” evolved into the categorization and sterilization of the intimate in order to push for the movement of objects across borders when bodies were not able to do so. It is not a reconstruction that gives way to artifice and formalises nostalgia, but rather an unlearning of societal notions of the home through undoing, un-naming. Indeed, the artist says she had never felt more at home than on countless FaceTime calls made throughout the process, detaching this notion of home from a physical space. Today, she can't even bring herself to borrow her own books from the exhibition, making feel like a thief in her own home, as the simultaneous dismantling and opening of the space has displaced the status of the personal.

Displacement, extraction, expulsion– gestures intended to erase are reappropriated by the artist in an act of what philosopher Elsa Dorlin theorises as negative care. Dorlin states that negative care is the permanent effort to understand the other as well as possible in order to defend oneself, a constant effort for those dominated to react in the face of the dominant rather than recoil. Ourahmane’s approach is similar in that her perseverance allows for an inversion of negativity into a form of care that facilitates change and letting go. The Third Choir (2014) exemplifies this tenacity and resolve through yet another displacement of objects. Realised for the artist’s degree show at Goldsmiths in London and later exhibited in Palermo during Manifesta 12 (2018), this work is a sound installation comprised of twenty Natfal oil barrels exported from Algeria, each containing mobile phones turned radio transmitters. The 934 documents illustrating the artist's correspondence with the government to export these barrels, a painting commissioned by BP to finance the project, and the endless negotiations behind this seemingly impossible feat, made The Third Choir the first work of art to be legally exported from Algeria since its liberation from France in 1962, rewriting export legislation that had been put in place to protect culture. Putting herself into a compromised position throughout the process– particularly as a young, single woman from a Christian family in face of Algerian authorities attempting to export contentious objects– Lydia Ourahmane nevertheless reflects on this disadvantageous operation positively, “It’s surprising to consider empathy or humanity as being miraculous conditions in the airtight world of bureaucracy and administration […] Encountering someone in a position of power who actually wants to help signifies that there might still be some hope. That we are not entirely disabled, motorized and operating at the disservice of each other. And we need to keep fighting for this kind of space.”

Displacement, extraction, expulsion– gestures that lead to absence, an absence that runs through the artist’s practice. In the work Oskar and Ola (2019) presented at Triangle – Astérides in the group exhibition En attendant Omar Gatlato: Regard sur l’art en Algérie et dans sa diaspora curated by Natasha Marie Llorens in the spring of 2021, two metal chains attached to dog collars laid on the floor. Next to the objects, a video (Boudjima , 2021) of the dogs who once adorned these collars run freely through a field in Algeria. These dogs bore witness to military forces sealing the door of the artist’s family home once used as a place of worship for Christians in Algeria to congregate as the freedom of religion had been made legal in 2006, later outlawed in 2017. The absence of bodies represented through the collars remind of the inaccessible house, and reflect the artist’s negotiation with the violent processes of being pushed out of a physical space. This absence, or rather suspension, is indeed present again in Barzakh as the title itself implies: in Arabic, it refers to a liminal, in-between state, that can relate to a space where a spirit awaits, between life and death, a physical space, as well as a place of judgement.

Ourahmane’s process of making art is a form of emotional, spiritual and physical labour that is necessarily relational. And in relational practices, the body is at work, even if, at times, absent. “My work is a lifeline. And so, my body becomes the site.” In the Absence of our Mothers (2018) is the climax of body-as-site in the artist’s practice. A melted down gold chain purchased by Ourahmane from a stranger at the same price of a boat trip to flee to Europe meets the story of the artist’s grandfather who extracted his own teeth to be discharged from the military: two separate narratives of escape that take shape in a gold tooth implanted in the artist’s mouth. Not a masochistic gesture to inflict pain on oneself, but rather a way of understanding trauma and dealing with it. “I would suffer if I didn’t do the work I do,” the artist states. Droit du sang (Blood Right) (2018), continues in the same vein, as it is a work documenting the process of claiming French citizenship, revealing the absurdity in the power that bureaucratic procedures have on individual identities. In these works, forms of negative care and material affect give a corporeal reality to histories of emigration and resistance.

From the body comes the question of surveillance, and how we are made aware of our movements in space, voluntarily or not. Because surveillance is a common theme in the artist’s practice, one that takes on two separate forms in Barzakh. On one hand, the blown glass sculptures that sit atop various pieces of furniture in the exhibition veil, but do not hide, bugging devices that are each assigned a telephone number, allowing anyone to tap into the exhibition and listen to what is taking place inside at all times. On the other, a laser beam (Eye, 2021) cuts through the exhibition space, projecting information collected from the outdoors (through a system of mirrors) into the exhibition. Once the laser beam is obstructed by the body of the viewer, the live transmission of the sound stops, or shifts. Each of these objects makes the viewer highly aware of their behaviour in the space, perhaps influencing the way that they carry themselves. These surveillance devices function as reminders that not all domestic spaces are “homes”, spaces of safety and comfort, but rather, for some, sites of violence, fear and paranoia.

When discussing Live Call (2019)– another work of surveillance and self-exposure for which the artist bugged her own cell phone allowing those experiencing the artwork to listen to the artist’s every move and conversation throughout the duration of the exhibition– Ourahmane explains that she "experiments with a kind of chaos that seems closer to the truth." This statement is reminiscent of a text found in Sophie Al Maria’s book Sad Sack: Collected Writings that sits silently on her desk in Barzakh awaiting its return to Algiers. “Swallowed by the chaos she once wore like a crown […] And [yet] she will continue to dance until you see her. Until you believe in her. Until you listen to her. Until you listen - to what she really means." In the face of administrative hells and trauma, Lydia Ourahmane tirelessly makes the seemingly impossible possible, pushing through chaos and retention to arrive at a form of care. A body of work that is indeed based on deeply personal experiences, but points to the dark realities we inherit collectively and proposes a singular way of how to process them.

1. Conversation with Lydia Ourahmane, 13 September 2021.
2. Elsa Dorlin, Se défendre, Éditions la découverte, Paris 2019, p. 200-212.
3. Ibid, p. 200-212.
4. Lydia Ourahmane in conversation with Eliel Jones, “On Belief: A conversation,” X-tra, 2021.
5. Lydia Ourahmane, “Home is Where You Are: Conversation Between Lydia Ourahmane and Elena Filipovic,” published on the occasion of the exhibition Barzakh at Kuntsthalle Basel, 02 March – 16 May 2021.
6. Conversation with Lydia Ourahmane, 13 September 2021.
7. Lydia Ourahmane in conversation with Harry Woodlock, “Vital Exhaustion: Late Capitalism and the Crisis of Pain” 4 December 2020.
8. Sophia Al Maria, Sad Sack. Collected Writing, Book Works, London, 2019.